Sécurité sociale
25 juillet 2025

Pour la Cour du travail de Bruxelles, le chauffeur Uber est un travailleur salarié.

Dans un arrêt du 13 juin 2025, la Cour du travail de Bruxelles décide qu’un chauffeur Uber exerçait son activité professionnelle en qualité de travailleur salarié et non en qualité de travailleur indépendant.

Faits 

Un travailleur indépendant, chauffeur Uber, a conclu un contrat-cadre de location de voiture avec chauffeur avec l’ASBL Belgian Platform Rider Association (BPRA). Il a également conclu un contrat de prestation de services avec Uber. Il fournissait des services de transport au moyen de l'application UberX à Bruxelles. 

Ce travailleur indépendant a saisi la Commission administrative de règlement de la relation de travail (CRT) afin d’obtenir la requalification de la nature de la relation de travail. Le travailleur estimait qu’il était un travailleur salarié plutôt qu’un travailleur indépendant. La CRT lui a donné raison et a reconnu la BPRA et Uber comme employeurs du travailleur. 

Procédure devant le Tribunal du travail francophone de Bruxelles 

Uber et la BPRA ont saisi le Tribunal du travail francophone de Bruxelles. Elles ont sollicité l’annulation de la décision de la CRT. Le 21 décembre 2022, le Tribunal leur a donné raison et a déclaré nulle et non avenue la décision de la CRT en estimant que la relation de travail entre le travailleur et Uber et BPRA est une relation de travail de nature indépendante. 

Le travailleur et l’ONSS ont interjeté appel. 

Arrêt de la Cour du travail 

Tout d’abord, la Cour juge régulière la décision de la CRT en considérant que le travailleur a introduit sa demande dans le délai d’un an prévu à partir du début de la relation de travail. 

Ensuite, la Cour décide que l’activité d’Uber ne se limite pas à un service d’intermédiation mais est en réalité un service global dont le service de transport est l’élément central. Sur cette base, la Cour analyse la relation de travail au regard de la présomption légale de salariat applicable au secteur des taxis, qui relève du secteur du transport de personnes pour le compte de tiers. 

Après analyse, la Cour décide que, dans le cas d’espèce qui lui est soumis, huit des neuf critères prévus par la législation pour affirmer qu’une relation de travail est une relation de travail salariée sont remplis. Seul le critère portant sur l’absence de garantie de volume de travail n’est pas rempli. Par conséquent, la Cour estime que la présomption légale d’existence d’un contrat de travail s’applique. 

Néanmoins, la Cour examine si la présomption légale d’existence d’un contrat de travail est susceptible d’être remise en cause. 

La Cour constate que le chauffeur n’est pas libre d’organiser son temps de travail. En réalité, le travailleur dispose uniquement de la liberté de choisir le moment où il se connecte à l’application. Pour le reste, le chauffeur ne maîtrise ni le moment où du travail lui est proposé, ni les délais d’attente entre les courses. En outre, il ne peut pas influencer l’attribution des courses. 

Par ailleurs, la Cour considère également que le chauffeur n’a pas la maîtrise de l’organisation de son travail une fois les courses acceptées. La Cour remarque que le chauffeur n’a pas le choix de l’itinéraire, qu’il ne connait pas à l’avance la destination de la course et que le prix est unilatéralement fixé et payé via l'application. 

Par ailleurs, la Cour met en évidence l’existence d’un contrôle hiérarchique exercé par Uber. Grâce à la géolocalisation permanente et au système d’évaluation, l’entreprise est en mesure de surveiller en temps réel l’activité des chauffeurs et peut prendre des sanctions à leur encontre. 

La Cour conclut qu’Uber et la BPRA n’avancent pas d’éléments permettant de renverser la présomption légale de salariat. La Cour réforme donc le jugement du Tribunal du travail francophone de Bruxelles et décide que le chauffeur travaillait dans le cadre d’un contrat de travail salarié avec Uber et la BPRA. 

Que retenir ?

Une relation de travail indépendante peut être requalifiée en relation de travail salariée. 

Dans certains secteurs, notamment le transport de personnes pour le compte de tiers, la législation prévoit une présomption d’existence d’une relation de travail salariée si quelques critères sont rencontrés. L’employeur peut renverser cette présomption. L’employeur doit alors prouver que le travailleur est libre d’organiser son temps de travail, est libre d’organiser son travail et que le travailleur ne fait pas l’objet d’un contrôle hiérarchique. 

Dans le cas qui lui est soumis, la Cour du travail de Bruxelles constate que les critères permettant de présumer l’existence d’une relation de travail salariée sont quasi tous réunis. Par ailleurs, la Cour constate que le chauffeur Uber n’est pas libre d’organiser son temps de travail, n’a pas la maîtrise de l’organisation de son travail et fait l’objet d’un contrôle hiérarchique. Toutes les conditions d’existence d’une relation de travail salariée sont ainsi réunies. 

Source : C. trav. Bruxelles, 13 juin 2025, R.G. n° 2023/AB/11 - 2023/AB/191 


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