Secteur public
15 novembre 2021

Accident du travail : recalcul du « capital-congé » suite à une décision de MEDEX

A quel moment l’autorité doit-elle mettre l’agent en disponibilité lorsque le lien causal entre les absences et l’accident est remis en cause par MEDEX ?

L’autorité doit-elle recalculer l’imputation sur le capital-congé à partir du moment où le lien causal entre les absences et l’accident du travail est remis en cause par MEDEX ? Peut-elle faire rétroagir sa décision de mise en disponibilité ? Quid si la décision de MEDEX est contestée devant les juridictions du travail ? Voici quelques questions sur lesquelles le Conseil d’Etat s’est penché dans son arrêt du 28 septembre 2021.

Contexte

Le requérant, assistant de surveillance pénitentiaire, est victime d’un accident du travail en date du 16 novembre 2016, suite à une agression d’un détenu, et est depuis lors absent pour maladie. Ces absences ne sont pas prises en compte dans le calcul du capital-congé dans la mesure où elles sont considérées comme liées à l’accident du travail.

Le 17 septembre 2018, MEDEX décide de consolider le cas à la date du 1er juin 2018, en reconnaissant au requérant une incapacité permanente partielle de 5 %.

Il découle de cette décision que les jours d’absence pour maladie intervenus depuis le 1er juin 2018 ne sont plus considérés en lien causal avec l’accident. En date du 7 novembre 2019, l’autorité procède au recalcul du capital-congé et décide de placer rétroactivement l’intéressé en disponibilité pour maladie à compter du 18 novembre 2018.

L’agent conteste cette décision devant le Conseil d’État en faisant valoir :

  • D’une part, le long délai qui s’est écoulé entre la décision de MEDEX et la décision de mise en disponibilité adoptée par l’autorité (dépassement du délai raisonnable) ;
  • D’autre part, la nécessité de surseoir à statuer dans la mesure où la proposition d’indemnisation établie le 29 novembre 2018 par l’autorité sur la base de la décision de MEDEX fait l’objet d’un recours toujours pendant devant les juridictions du travail.

En cours de procédure, le requérant est admis à la retraite temporaire prématurée avec effet au 1er juillet 2020.

Décision du Conseil d’État

Le Conseil d’Etat décide tout d’abord que l’admission à la retraite anticipée du requérant ne lui fait pas perdre son intérêt au recours dès lors qu’une annulation lui permettrait d’obtenir une révision de sa période de mise en disponibilité, ce qui pourrait avoir une conséquence sur le montant de sa pension. Le recours est donc jugé recevable.

En ce qui concerne le premier moyen, le Conseil d’État rappelle qu’en vertu des dispositions statutaires applicables, l’agent qui est absent pour maladie après avoir atteint le nombre de jours de congés pour maladie admissibles (capital-congé) se trouve de plein droit en disponibilité pour maladie.

En vertu de ces dispositions, l’autorité ne peut placer l’agent en disponibilité qu’à partir du moment où elle a constaté l’épuisement du capital-congé. Une telle décision est donc nécessairement rétroactive. 

Toutefois, la décision de l’autorité doit intervenir dans les limites d’un délai raisonnable, tenant compte des nécessités de l’instruction du dossier. Or, en l’espèce, le Conseil d’Etat constate que la décision de l’autorité de placer l’agent en disponibilité intervient plus de 13 mois après la décision définitive du MEDEX fixant la date de consolidation des lésions. À tout le moins, à partir du 29 novembre 2018, l’autorité savait que les absences postérieures au 31 mai 2018 étaient imputables sur le quota de jours de congés de maladie du requérant.

En conséquence, le Conseil d’État annule la décision litigieuse mais uniquement en ce qu’elle fait rétroagir la prise de cours de la période de disponibilité à la date du 18 novembre 2018.

Sur le deuxième moyen soulevé par le requérant, le Conseil d’État rappelle que les décisions du MEDEX portant sur les aspects médicaux d’une demande de réparation du dommage résultant d’un accident du travail lient l’administration employeuse aussi longtemps que la juridiction du travail compétente ne les remet pas en cause. La décision de MEDEX est exécutoire et le recours devant les juridictions judiciaires n’a aucun effet suspensif.

Ainsi, l’autorité peut prendre une décision sur base des constatations médicales du MEDEX sans attendre l’issue du litige porté devant les juridictions du travail.

Le Conseil d’Etat rejette dès lors le moyen, en précisant néanmoins que si le requérant devait finalement obtenir une décision favorable dans le cadre de son recours devant les juridictions du travail, cela obligerait l’autorité à réexaminer le dossier et à reprendre une nouvelle décision.

Que retenir ?

La décision de MEDEX fixant la date de consolidation des lésions consécutives à un accident du travail lie l’autorité tant qu’elle n’a pas été invalidée par les juridictions du travail. L’autorité peut donc valablement adopter une décision de mise en disponibilité, en imputant sur le capital-congé de l’agent les journées d’absence pour maladie dont la causalité avec l’accident est rejetée par MEDEX, alors même que ce point ferait l’objet d’une contestation judiciaire.

L’autorité doit adopter sa décision de mise en disponibilité dans un délai raisonnable à partir du moment où elle dispose des éléments utiles pour procéder au (re)calcul des jours de congé imputables sur le capital-congé (en l’espèce, dès qu’elle a connaissance de la décision de MEDEX), sous peine de ne plus pouvoir faire rétroagir sa décision à la date à laquelle le capital-congé a été épuisé.

Source : C.E., 28 septembre 2021, n°251.644, David.

We use cookies to track usage and preferences Legal terms I Understand