L’autorité peut sanctionner un agent pour des dysfonctionnements induits par l’alcool
Le Conseil d’État examine la régularité, au regard de la législation anti-discrimination, d’une sanction disciplinaire fondée sur des dysfonctionnements induits par l’alcool.
Le Conseil d’État examine la régularité d’une sanction disciplinaire fondée sur des dysfonctionnements induits par l’alcool. En particulier, il analyse si une telle sanction constitue une discrimination sur base de l’état de santé.
Contexte
L’agent est assistante technique éducatrice dans une école communale. Elle est chargée de la surveillance d’enfants de cinq à huit ans. À plusieurs reprises, elle présente des signes d’ivresse et commet des dysfonctionnements graves. Elle s’absente notamment du travail en laissant seuls les enfants. L’autorité établit plusieurs constats écrits.
Après plusieurs constats, la commune entame une procédure disciplinaire. Le conseil communal inflige à l’agent une sanction de démission d’office.
L’agent introduit un recours en annulation contre cette décision. Elle considère notamment que la décision disciplinaire constitue une discrimination sur base de son état de santé, compte tenu de son assuétude à l’alcool.
Décision du Conseil d’État
La loi du 10 mai 2007 tendant à lutter contre certaines formes de discrimination, interdit toute forme de discrimination fondée sur des critères limitativement énumérés (notamment, l’état de santé). Une discrimination est toute distinction – directe ou indirecte – fondée sur l’un des critères protégés, à moins que cette distinction ne soit justifiée conformément à la loi. Une distinction indirecte ne constitue toutefois pas une discrimination si la distinction est objectivement justifiée par un but légitime et si les moyens de réaliser ce but sont appropriés et nécessaires.
En l’espèce, la sanction disciplinaire constitue une distinction indirecte et cette distinction est justifiée :
- D’une part, la nécessité pour l’autorité de sanctionner les fautes commises par ses agents dans l’exercice de leurs fonctions – en particulier dans le cadre de la surveillance de jeunes enfants – constitue un but légitime. Si une autorité ne peut justifier une sanction disciplinaire de démission d’office par la maladie d’un agent, elle peut sanctionner les éventuelles conséquences de cette maladie sur le lieu de travail. Tel a précisément été le cas en l’espèce.
- D’autre part, la sanction de démission d’office est une mesure proportionnée à l’objectif poursuivi, compte tenu des responsabilités de l’agent et des multiples mises en garde formulées par la commune. La sanction disciplinaire respecte un équilibre raisonnable entre d’une part, la protection des libertés et droits fondamentaux individuels, et d’autre part, le droit des enfants à la protection de leur intégrité.
La sanction disciplinaire ne constitue donc pas une discrimination indirecte.
Que retenir ?
Une autorité peut sanctionner un agent sur base des dysfonctionnements induits par l’alcoolisme. Une telle sanction ne constitue pas une discrimination sur base de l’état de santé dès l’instant où la sanction repose sur un objectif légitime (par exemple, la nécessité de mettre un terme aux dysfonctionnements) et constitue un moyen approprié et nécessaire pour atteindre cet objectif (par exemple, eu égard aux responsabilités de l’agent, aux précédentes mises en garde, etc.).
Source : C.E., 25 juin 2024, arrêt n° 260.250.